Résonance

La rentrée se prépare. Le temps de se dire : qu’ai-je appris l’année passée et que vais-je mettre en musique à partir de septembre ?

Couverture du livre d'Hartmut Rosa, pédagogie de la résonance

Une lecture m’a touchée l’an dernier car elle mettait un mot sur ce que j’ai vécu avec mes étudiant·e·s de PPA Business School (Campus de Nantes) lors de mes cours d’éloquence : celui de « résonance ».

Hartmut Rosa, sociologue et philosophe allemand dont j’aime beaucoup les travaux sur notre rapport au temps, utilise ici un concept dont la signification première est : « propriété qu’ont certains objets, certains lieux d’amplifier ou de prolonger le son. » (selon le dictionnaire de l’Académie française). Il s’agit donc de vibration, de la sensibilité à certaines fréquences…

Cette « résonance » est présente dans une salle de cours quand quelque chose se communique entre la personne qui dispense le cours et celles et ceux qui sont en posture d’apprendre, au-delà des seules techniques transmises : quand les yeux brillent, ceux de l’enseignant·e enthousiaste et ceux de ses élèves, et que cette qualité de relation crée un axe qui permet à celles et ceux qui écoutent d’être plus que des « réceptacles » que l’on remplirait d’un savoir nouveau. La dynamique qui s’installe leur permet de se transformer.

La méthode ? Une certaine forme de lâcher prise (tout en gardant le cadre) car ce n’est pas une science exacte. Et une constante : veiller à ce que la confiance s’installe pour permettre au « flow », pour reprendre une autre expression, de naître, voire s’amplifier.

Alors finalement, peu importe si untel à un moment de la longue journée de cours pique du nez car il n’a pas assez dormi, peu importe si une telle demande à aller aux toilettes avec en main son précieux portable pour un appel perso qu’elle espérait discret…

Pour moi, l’important est qu’ils soient vraiment « disponibles » pour apprendre, et s’ils ne sont pas en mesure de l’être sur quelques minutes, je leur laisse la possibilité de décrocher pour mieux les solliciter après. Lorsque j’interviens sur 6 heures dans la même journée, et ce à trois reprises, avec les mêmes étudiants, je fais le choix de la souplesse tout en étant ferme sur les consignes et les attendus.

J’ai mis ces étudiant·e·s au défi de parler d’eux-mêmes devant leurs camarades. Pour cela, il faut de la confiance à tous les niveaux. Je ne me gargarise pas du fait qu’un étudiant m’ait dit à la fin de la séquence : « Vous au moins, Madame, vous êtes gentille ». On n’est pas là, en tant qu’enseignant, pour être gentil. Pour autant, on n’est pas là non plus pour créer un rapport de force qui peut engendrer de l’opposition.

Ce qui compte, c’est la suite du retour que ce jeune homme tenait à me faire : « Et on sent que vous êtes passionnée par ce que vous faîtes. »

Quand au bout de la journée, et même après les évaluations, certains restent ainsi pour continuer d’échanger sur le cours ; quand pour le pitch final, toutes et tous jouent le jeu, montre leurs engagements, et parfois même leur vulnérabilité, je me dis que dans cette séquence, il s’est passé quelque chose de vraiment intéressant. Et que nous avons construit un bel axe de résonance.

Alors, plus de cadre ou plus de souplesse pour ancrer les apprentissages ? Le débat est ouvert… Mais surtout : de la passion partagée ! Je vous souhaite en cette rentrée plein d’étoiles dans les yeux.

Hartmut Rosa, Pédagogie de la résonance, entretiens avec Wolfgang Endres, Le Pommier, 2022.

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